Face à une crise du logement qui touche des millions de Français, Sophia Chikirou, députée du groupe La France Insoumise, a déposé une proposition de loi pour freiner la spéculation immobilière liée aux investissements directs étrangers (IDE). Ce texte, co-signé par de nombreux députés du groupe LFI, s’attaque à une problématique qui ne cesse de s’aggraver : l’exclusion des classes modestes et moyennes du marché immobilier, aussi bien dans les grandes zones urbaines que dans les zones rurales touristiques.
Un constat alarmant : les prix de l’immobilier ont grimpé de plus de 150 % en vingt ans, contre une augmentation des revenus de seulement 20 %.
En Île-de-France, cette inflation atteint même 300 %. Résultat : se loger est devenu un luxe pour une large partie de la population. Les 10 % des ménages les plus modestes consacrent jusqu’à 40 % de leurs revenus au logement, tandis que l’accès à la propriété, jadis accessible aux classes moyennes, est aujourd’hui réservé aux foyers les plus aisés.
La crise est particulièrement aiguë dans les zones dites « tendues », qui concernent près de 12,4 % des logements en France. Ces zones, où l’offre de logements est insuffisante par rapport à la demande, voient leurs prix et loyers s’envoler, repoussant les ménages modestes vers les périphéries. Les jeunes adultes et les familles les plus précaires sont les premières victimes de cette dynamique.
Le rôle des investissements étrangers dans la spéculation immobilière
Un facteur clé de cette flambée des prix est l’augmentation des investissements directs étrangers dans l’immobilier. Selon les données citées dans la proposition de loi, ces investissements représentent un stock annuel de 168 milliards d’euros. À Paris, les non-résidents possèdent jusqu’à 20 % des logements dans certains quartiers prisés, comme les zones touristiques ou bourgeoises. Ces acquisitions, souvent destinées à des « pieds-à-terre » ou à des investissements locatifs, accentuent la tension sur le marché immobilier et excluent les habitants locaux.
Sophia Chikirou souligne que cette dynamique va à l’encontre de la mission de l’État de garantir un logement accessible et digne pour tous. Elle rappelle que d’autres pays, comme le Canada, ont déjà adopté des mesures similaires. Depuis janvier 2023, le Canada interdit aux non- résidents d’acheter des biens immobiliers afin de contrer la spéculation et de recentrer le marché sur les besoins des résidents.
Les mesures proposées : des restrictions ciblées
La proposition de loi introduit un dispositif clair et ciblé. Elle impose que toute transaction immobilière dans des zones de plus de 50 000 habitants soit conditionnée à la vérification de la résidence fiscale en France de l’acquéreur. Les non-résidents seraient ainsi empêchés d’acheter des biens dans ces zones, à l’exception de cas spécifiques. Cette mesure s’inscrit dans une approche pragmatique, visant les zones les plus tendues où la spéculation étrangère a un impact significatif. Elle s’appliquerait du 1er avril 2025 au 1er avril 2027, avec une clause d’évaluation pour mesurer son efficacité avant une éventuelle prorogation.
Des objectifs ambitieux mais nécessaires
L’objectif premier est de réduire la demande spéculative étrangère, ce qui devrait mécaniquement faire baisser les prix de l’immobilier dans les zones concernées. Cela permettrait également de redonner du pouvoir d’achat aux ménages français en limitant leur effort financier pour se loger. En favorisant l’accès à la propriété pour les résidents fiscaux français, cette proposition vise également à réduire les inégalités sociales et territoriales. Aujourd’hui, seuls 15 % des jeunes ménages modestes sont propriétaires, contre 66 % des jeunes ménages aisés. Cette loi pourrait inverser cette tendance en rééquilibrant l’offre et la demande.
Sophia Chikirou et LFI : une réponse politique à une urgence sociale
Pour Sophia Chikirou, cette proposition s’inscrit dans une vision globale des politiques publiques du logement. Elle souligne que le logement est un droit fondamental et qu’il est inacceptable que des mécanismes purement financiers empêchent les citoyens français d’y accéder.
Cette initiative reflète également les priorités de La France Insoumise, qui est à l’origine d’une dizaine de propositions de loi visant à protéger le logement, à le rendre acessible et digne, tant pour les locataires que pour les propriétaires. En ciblant les investissements étrangers, LFI entend dénoncer un modèle économique où le logement est traité comme un produit spéculatif plutôt qu’un bien de première nécessité.
Une réforme essentielle pour un logement accessible
La proposition de loi portée par Sophia Chikirou marque une étape importante dans la lutte contre la spéculation immobilière. En s’attaquant directement aux investissements étrangers, elle ambitionne de rendre le marché immobilier plus juste et plus accessible pour les résidents français. Si elle est adoptée, cette mesure pourrait avoir un impact immédiat et significatif sur les prix dans les zones tendues, tout en envoyant un signal fort : en France, le logement n’est pas un produit d’investissement, mais un droit pour tous.